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Pourquoi les banque digitales sont si peu fréquentés?

A Abidjan malgré la digitalisation des banque, chaque fin de mois, il est fréquent d’apercevoir de très longues files d’attente devant les distributeurs des banques ayant le plus de clients alors qu’à proximité se trouve des DAB, “chargés”, fonctionnels et fluides. Ce phénomène se répète d’ailleurs à travers l’Afrique sub-saharienne. Allavo, expert en inclusion financière et en éducation financière numérique ne s’en étonne plus : “Toutes les fins de mois, tu vois des rangs « terribles » et parfois il y a des gens qui sont venus juste pour retirer 5.000 francs.  

Pourquoi un tel phénomène? Pourquoi les clients n’arrivent pas à adopter les innovations proposées par les banques?  Est-ce parce qu’ils ne sont pas informés? Est-ce parce que les services ne sont pas adaptés? 

Si les banques ont développé de nombreux produits pour faciliter les transactions de leurs clients, force est de constater que ces derniers ne les ont pas souvent adoptées. Beaucoup de clients de banques ne savent même pas qu’il existe une interbancarité dans l’espace UEMOA. Pourtant un détenteur d’une carte appartenant à un réseau partenaire, peut effectuer ses opérations dans les DAB (distributeurs automatiques de billets) et TPE des autres banques membres de ce même réseau. Mais ces retraits effectués sont facturés en fonction de la zone. Et c’est là où cela coince. 

i en Europe, ces opérations sont, dans une certaine mesure, gratuites, dans la zone UEMOA et CEMAC, ces frais sont de 500 FCFA et facturés aux clients automatiquement, quel que soit le montant retiré. Ce montant, qui a été fortement réduit, est jugé élevé, en particulier pour les personnes à faible revenu. Et nombreux sont ceux qui ne retirent que dans les DAB de leur banque pour ne rien payer. Mais la question n’est pas que la problématique du coût. Il est temps que les initiatives d’éducation financière et digitale soient renforcées. La mise en service des solutions digitales reste très opaque. La communication est sans doute maladroite ou mal adaptée en interne comme en externe. Il faut identifier et utiliser les bons canaux pour atteindre l’ensemble de la population cible. Un client non sensibilisé n’utilisera pas un service qui par ailleurs lui engendre des coûts supplémentaires d’autant plus s’il a une alternative gratuite. Aujourd’hui avec le GIM UEMOA, les frais ont baissé et les services monétiques sont plus accessibles. Une grande partie de la population ne conçoit pas de payer pour retirer de l’argent sur son compte bancaire, mais n’hésite pas à utiliser d’autres services plus onéreux, comme le mobile money, qui offre une valeur ajoutée certaine notamment au niveau de la proximité et de réactivité en cas d’incident. 

Les délais de régularisation des impayés gab et débit à tort trop long

En effet, les frais de retrait ne sont pas la seule cause de ces longues files d’attente. Le délai de traitement des réclamations monétiques est aussi un défi majeur. Jean-Philippe MIAN, consultant, s’explique : “ quand vous avez un débit à tort, la procédure de recouvrement des sommes indûment débitées peut s’avérer très longue pour des personnes qui ont instantanément besoin de leurs deniers. Ainsi, pour se protéger, certaines personnes préfèrent simplement retirer aux DAB des banques au sein desquelles sont domiciliés leurs comptes. Comme le disent les Ivoiriens *palabre n’est pas bon*. Les clients des banques ou les porteurs de carte sont disposés à les utiliser mais ne sont pas très rassurés sur l’issue de l’opération (même s’il y a beaucoup d’amélioration) surtout quand ils sont en déplacement et n’ont pas de bonne expérience de traitement d’impayés ; et ceci a contribué à entacher la confiance des clients envers certains services digitaux. Achille, consultant international de la zone CEMAC, après de multiples tentatives infructueuses de retrait lors de ses voyages en Côte d’Ivoire et au Sénégal, est désormais frileux quant à l’utilisation de sa carte. Il a opté pour le transfert d’argent et gère son budget en espèces lors de ces déplacements. Ce qui est très contraignant.

Le manque de confiance des utilisateurs 

La confiance est une condition clé pour l’adoption du digital perçu comme risqué, qui par conséquent nécessite un accompagnement. C’est l’un des challenges de la transformation digitale dans tous les domaines. Aristide, chef de projet senior, relatait : “ Il y a quelques années, quand des bornes ont été déployées à l’entrée de la salle d’embarquement de l’aéroport d’Abidjan, personne n’y allaitPersonnellement je n’avais pas confiance dans la qualité de service des bornes proposées et la perspective de revenir à la queue du rang suite à un éventuel bug ne m’enchantait pas…. “ Ce manque de confiance est un véritable frein à l’utilisation des services et les institutions financières doivent prendre ce facteur en compte dans leur stratégie prioritaire. Un client confiant dans l’exécution d’un service, en devient le prescripteur. Pour que cette confiance existe, il faut qu’il comprenne le service et son utilité. D’où la nécessité de l’impliquer dans le processus de conception des produits.  

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